Protection des espèces à enjeux

Bertrand SCHATZ (CNRS – CEFE)

La première solution pour la conservation de la biodiversité est de protéger certaines espèces reconnues comme vulnérables, rares, menacées et/ou endémiques. Au niveau international, la convention CITES (aussi appelée « Convention de Washington »), réglemente le commerce international des spécimens des espèces inscrites à ses annexes, donc les échanges d’espèces entre pays ; elle concerne plus de 3 000 espèces animales et 40 000 espèces végétales. La Convention Ramsar (UNESCO, 1970) régit la protection des espèces des zones humides ; à noter le réseau MedWet qui organise la gestion durable des zones humides dans la région méditerranéenne (27 pays) mais sans pouvoir réglementaire. Au niveau européen, certaines espèces sont protégées via notamment la convention de Bonn (1979) pour les espèces animales migratrices, et la Convention de Berne (1979) pour la vie sauvage (faune et flore) et le milieu naturel.

En France, il existe des listes d’espèces protégées au niveau national, qui concernent différents groupes taxonomiques comme les plantes vasculaires qu’il faudrait actualiser (Schatz et al., 2014) mais aussi pour les différents groupes d’espèces animales. Ainsi, il est interdit de détruire, de modifier ou de dégrader les habitats naturels de ces espèces protégées sous peine d’amende. La fonge (champignons), les plantes non vasculaires (lichen, fougère, mousses…), les invertébrés et les espèces de milieu marin restent peu concernés par ces listes nationales même si des projets d’actualisation de ces listes permettraient de les inclure prochainement. En région Occitanie, il existe aussi des listes d’espèces protégées régionales qui viennent compléter ces listes nationales. Cependant, un effort reste à accomplir pour fusionner les listes d’espèces protégées régionalement issues de l’ex-Languedoc-Roussillon et de l’ex-Midi-Pyrénées (et parfois de certaines listes de protection départementales). Cet effort d’actualisation de listes d’espèces en protection régionale est aussi l’occasion d’une actualisation nécessaire prenant en compte les évolutions récentes des effectifs des espèces.

Plusieurs espèces bénéficient d’un plan de conservation comme le bouquetin ibérique et plus fréquemment d’un plan national d’actions (PNA) ayant des objectifs de connaissance, de conservation et de sensibilisation. C’est le cas de certaines espèces uniquement présentes en Occitanie comme les trois lézards pyrénéens (de Bonnal, du Val d’Aran et d’Aurélio), l’ours brun, l’aster des Pyrénées et le desman des Pyrénées (présent aussi en Nouvelle Aquitaine), mais ces PNA concernent également plusieurs autres espèces ou groupes d’espèces présentes dans d’autres régions. Plusieurs PNA sont gérés par la DREAL Occitanie qui coordonne l’action nationale (aigle de Bonelli, aster des Pyrénées, bouquetin ibérique, desman des Pyrénées, emyde lépreuse, faucon crécerellette, grand tétras des Pyrénées, lézards des Pyrénées, ours brun et vautour moine). Ces PNA se déclinent souvent en PRA, c’est-à-dire en plans régionaux d’actions pour mieux adapter ces actions aux particularités régionales ; c’est le cas pour les chauves-souris, les pollinisateurs, les odonates et les papillons de jour.

Il existe les listes rouges d’espèces qui sont établies selon une méthode standardisée par l’UICN, ces listes se déclinant aux échelles mondiales, européennes, méditerranéennes, nationales et régionales. Elles ont le double objectif d’identifier les espèces en données insuffisantes ayant un besoin de connaissance naturaliste et scientifique et d’identifier les espèces menacées (somme des espèces catégorisées en danger critique d’extinction (CR) plus celles en danger (EN) plus celles vulnérables (VU)). Attention, ces listes rouges ne sont pas des listes d’espèces protégées et n’ont donc pas de pouvoir réglementaire ; elles sont plutôt un outil de communication efficace pour identifier les espèces menacées (et celles en besoin de connaissance) mais aussi pour définir les menaces pesant sur ces espèces et les pistes de solutions pour améliorer leur conservation. Elles permettent aussi d’établir des cartes localisant la présence cumulée des espèces menacées (voir ci-après les exemples pour l’Occitanie).

Pour l’ensemble de ces espèces protégées, il est crucial de documenter et d’actualiser régulièrement les évolutions récentes d’effectifs et de distribution en intégrant la migration attendue des espèces vers le nord ou en altitude. Ainsi, les collectivités en charge de ces protections devront acter ces changements prévus voire les anticiper. Dans ce contexte, l’Occitanie devrait fusionner rapidement les listes d’espèces en protection régionale des deux régions dont elle est issue mais aussi mettre en place une actualisation des listes d’espèces protégées et celles à enjeux, et des sites de suivis à long terme.

Aller plus loin :

  • Liste rouge des Lépidoptères Rhopalocères (Papillons diurnes) & Zygènes d’Occitanie – 2019.
  • Carte du nombre d’espèces menacées des Lépidoptères Rhopalocères (Papillons diurnes) & Zygènes d’Occitanie classées CR, EN, VU et NT par mailles 5×5 km en Occitanie. Données issues des bases des différents partenaires du projet sur la période récente (2008-2018).
  • Liste rouge des Odonates (libellules) d’Occitanie.
  • Carte du nombre d’espèces menacées des Odonates (libellules) d’Occitanie classées CR, EN, VU et NT par mailles 5×5 km en Occitanie – Données issues des bases des différents partenaires du projet sur la période 2007-2017.