Santé et changements climatiques : histoire, relations et conséquences

Virginie HUGUES (consultante)

Les changements climatiques sont des phénomènes complexes dont les effets, multiples et interconnectés, impactent les milieux, naturels et anthropisés, les ressources, et les activités économiques. Le secteur de la santé n’est pas épargné car les changements climatiques ont des conséquences en termes de santé physique des individus, par les vagues de chaleur, l’apparition de zoonoses, les sécheresses et pressions sur les ressources naturelles etc., mais aussi de santé mentale, par l’apparition de stress post-traumatiques suite à des évènements extrêmes, ou encore par l’anxiété générée par ces phénomènes globaux, parfois insaisissables et dont la temporalité, à la fois de court et de long terme, peuvent conduire à un sentiment d’angoisse et d’impuissance (Albrecht, 2003, 2020).

De nombreux termes ont émergé au cours des dernières années, en particulier dans le monde anglo-saxon, pour désigner ces sentiments d’inquiétude et d’anxiété face à un environnement changeant et incertain (« éco-anxiété », « solastalgie », « anxiété climatique », mais aussi « deuil écologique », détresse environnementale » etc.).

Les changements climatiques, qui s’inscrivent dans une dynamique de changements globaux (artificialisation des sols, pollution de l’air, érosion de la biodiversité…) ont des effets directs (modifications des données météorologiques, évènements extrêmes…) et des effets indirects via l’environnement (modifications des écosystèmes, du cycle de l’eau, pollutions…) et via les déterminants socio-économiques (infrastructures, production agricole, déplacements de populations, conflits…) sur la santé des populations. Les stratégies d’adaptation permettront de s’ajuster à ces effets interdépendants et minimiser leurs conséquences (nombre de décès, pathologies chroniques, blessures, réduction de l’espérance de vie, malnutrition, anxiété…) (Santé Publique France, 2021).

La santé environnementale est définie par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) comme « les aspects de la santé humaine, y compris la qualité de vie, qui sont déterminés par les facteurs physiques, chimiques, biologiques, sociaux, psychosociaux et esthétiques de notre environnement. Elle concerne également la politique et les pratiques de gestion, de résorption, de contrôle et de prévention des facteurs environnementaux susceptibles d’affecter la santé des générations actuelles et future ».

La santé environnementale doit tenir compte de tous les exposomes auxquels sont confrontés les individus : ces facteurs exogènes liés à l’environnement qui ont des effets sur la santé (qualité des milieux, activités humaines, conditions de vie, expositions professionnelles, comportements individuels, etc.) (Lajarge, 2017).

Face à la prise de conscience généralisée des effets multisectoriels des changements climatiques, la santé environnementale devient une priorité des autorités de santé publique depuis plusieurs années. Initialement, dans les années 1980-1990, les changements climatiques étaient envisagés comme l’unique déterminant environnemental des conséquences sanitaires constatées, par le biais des changements au niveau des « micro-organismes, des agrosystèmes, de l’hydrologie et des changements démographiques ou socio-économiques » (IRD, 2015).

Autour des années 2000, cette vision linéaire s’estompe au profit d’une meilleure intégration de la dimension humaine et de ses capacités « d’anticipation et de résilience » face aux changements globaux. Aujourd’hui, les changements climatiques sont davantage perçus comme une composante des changements environnementaux globaux, au même titre que la dégradation et la perturbation des écosystèmes, les changements d’usage des sols etc., avec, au centre des études, les activités et comportements humains (IRD, 2015). L’analyse des impacts sanitaires des changements climatiques inclue également d’autres facteurs qui entrainent des perturbations à l’échelle globale.

Les liens entre les changements climatiques et leurs effets sur la santé restent complexes, d’autant plus que la santé publique dépend de nombreux facteurs, internes et externes aux individus et aux territoires, et qui impactent directement ou indirectement la santé physique et mentale des individus.