Économie et vulnérabilité des plages face à la submersion marine

Hélène REY-VALETTE (UM – CEE-M)

Les plages ont un rôle déterminant pour l’attractivité touristique et récréative des communes littorales. Avec les cordons dunaires auxquels elles sont généralement associées, elles constituent aussi une source de biodiversité et une infrastructure naturelle de protection par rapport aux effets des tempêtes. Lorsqu’elles sont naturelles, leur mobilité leur permet de s’adapter à une augmentation progressive du niveau de la mer. A l’inverse, en fonction de leur taille ou de leur pente, les plages des secteurs urbanisés peuvent être très vulnérables et à terme disparaitre du fait de l’aggravation des processus d’érosion et de submersion générés par l’augmentation du niveau de la mer. En Occitanie, les plages largement ouvertes, sont particulièrement vulnérables. Pour 1 mètre d’augmentation du niveau de la mer en 2100 et dans un scénario d’absence d’adaptation planifiée, c’est 27 % de la surface des plages qui serait perdue, avec des résultats très différenciés allant de 5 % à 50 % selon les communes (Rey-Valette et al., 2016).

Les conséquences économiques de cette vulnérabilité sont importantes, mais difficiles à estimer du fait de l’absence de suivi des flux de fréquentation, des retombées économiques, et plus généralement de la valeur des services écosystémiques rendus par les plages. Les usages et les stratégies d’aménagement et de conservation des plages (construction d’épis et de brise-lames, rechargement…) doivent être appréhendés en analysant les solidarités économiques et territoriales qu’elles impliquent entre les collectivités littorales et rétro-littorales à différentes échelles. Une estimation des valeurs d’usage des pages a été réalisée en 2009 (projet MISEEVA coordonné par la BRGM) à partir d’enquêtes visant à évaluer les consentements à payer des usagers pour le maintien des services récréatifs et des services de protection des plages. La valeur accordée par les résidents principaux et secondaires à la protection contre les tempêtes s’élève à 2,1 millions €/hectare tandis que leur valeur récréative pour l’ensemble des usagers (résident principaux et secondaires, touristes et excursionnistes) s’établit à 3,3 millions €/hectare (euros 2010). Le cumul de ces deux fonctions permet d’estimer la valeur d’usage d’un hectare de plage à 5,4 millions €, et dès lors, l’effet du changement climatique (perte maximale de 27 %) à l’échelle régionale à 2,43 milliards € (euros 2010) (Rey-Valette et al., 2016).

Outre cette valeur d’usage rendant compte de leurs fonctions, les plages génèrent aussi de nombreux emplois directs et indirects et d’importants flux financiers dans l’économie locale liés aux chiffres d’affaires des activités présentes sur les plages ou à proximité immédiate (concessions, restaurants, vendeurs ambulants) et aux budgets dépensés par les collectivités pour le maintien des plages (rechargement, épis, ganivelles…) et en lien avec les services offerts par les collectivités (postes de secours, nettoyage des plages, toilettes et douches, aires de jeux, aménagements handicapés…). Néanmoins, ces flux sont difficiles à évaluer en l’absence de comptabilité analytique au sein des collectivités. A moyen terme face aux coûts croissants de rechargement, il s’agira pour les plages urbaines de mettre en oeuvre des politiques d’adaptation impliquant la relocalisation des biens et infrastructures les plus exposés afin de réduire la vulnérabilité des plages et maintenir l’attractivité de ces territoires.

LES ACTEURS D’OCCITANIE SE MOBILISENT

Réorganiser le territoire pour renaturer le site emblématique du Petit Travers – 34

Conservatoire du littoral – En savoir plus

Site emblématique du tourisme littoral méditerranéen dès la fin des années 1960, le site du Petit Travers a petit à petit été dégradé par la sur-fréquentation (environ 1 million de visiteurs par an) et les usages anarchiques. Pour faire face à ces problématiques accentuées par un contexte d’érosion du littoral (lié à la construction de digues et d’épis en amont du transit sédimentaire entre 1970 et 1995), un ensemble d’actions de renaturation du cordon dunaire et de réorganisation complète de l’accueil sur le site a été mené jusqu’en 2015, avec notamment la suppression d’un tronçon de la route départementale construite sur la dune. 5 ans après, la résilience et la naturalité du cordon et des milieux d’arrière-dunes s’expriment nettement. La dynamique côtière, avec l’engraissement à l’est et l’érosion à l’ouest, se poursuit dans un contexte géomorphologique rendu plus souple par l’aménagement. Le cordon dunaire semble avoir retrouvé une partie de sa mobilité nécessaire à l’adaptation au changement climatique.