Impact du changement climatique sur les dommages dus au retrait-gonflement des argiles

Sébastien GOURDIER (BRGM)

Le phénomène de retrait-gonflement des argiles (RGA) engendre chaque année des dégâts considérables, indemnisables au titre des catastrophes naturelles. La grande majorité des sinistres concerne les maisons individuelles. En France métropolitaine, ce phénomène, mis en évidence à l’occasion de la sècheresse exceptionnelle de l’été 1976, a pris une réelle ampleur lors des périodes sèches des années 1989-91 et 1996-97, lors de la sècheresse exceptionnelle de l’été 2003 puis, dernièrement, lors des étés 2018 et 2019. Il génère en outre un fort impact financier pour la collectivité : la Caisse Centrale de Réassurance (CCR) estime le coût total des sinistres liés au RGA pour la période 1989-2019 à 13,5 milliards d’euros.

Plus de 11 500 communes ont été reconnues au moins une fois en état de catastrophe naturelle pour la sècheresse, soit près du tiers des communes françaises, et près de 33 000 arrêtés ont été pris depuis 1989. La région Occitanie cumule à elle seule 27 % du coût national des dommages liés au RGA (CCR, 2015) et près de 43 % des communes de la région ont été touchées au moins une fois par le phénomène. La carte d’exposition publiée en 2019 sur le portail Géorisques indique que le territoire régional est couvert à 68 % par des sols argileux plus ou moins sensibles aux variations de teneurs en eau : 31 % du territoire présente un niveau d’exposition fort au RGA, 28 % un niveau moyen et 9 % un niveau faible (figure 5.9).

Les projections climatiques prévoient une augmentation de l’intensité et de la fréquence des épisodes de sècheresse, à différents degrés selon les scénarios d’émission de gaz à effet de serre envisagés. À la fin du siècle, on pourrait connaitre des sècheresses comparables à celle de 2003 trois à quatre fois par décennie et ces sècheresses pourraient atteindre des zones jusque-là épargnées, telles que les zones montagneuses.

Le BRGM a développé un modèle de coûts des dommages liés au RGA basé sur les projections climatiques du GIEC et les prospectives démographiques à l’horizon 2070 (MEDDE, 2012). Ce modèle permet d’évaluer l’impact du changement climatique sur la sinistralité. Ainsi, le coût total de la sinistralité liée au RGA, calculé par le modèle entre 2021 et 2050 suivant un scénario de référence ne tenant pas compte du changement climatique, est de l’ordre de 3,0 Mds €, soit un coût annuel moyen de 100 m€, à comparer au coût annuel moyen de 88 m€ enregistré entre 1990 et 2013 (Gourdier et Plat, 2018). La différence est expliquée par l’augmentation du parc immobilier en lien avec l’augmentation de la population. En intégrant le changement climatique dans le calcul, le coût total est estimé entre 7,0 Mds € et 8,8 Mds €, soit un coût environ 2,6 fois supérieur à celui estimé suivant le scénario de référence (FFA, 2015). Pour réduire ce risque qui va croitre dans les années à venir et s’adapter au changement climatique, il apparait donc nécessaire de modifier nos pratiques constructives.

Figure 5.9. Carte d’exposition au retrait-gonflement des argiles à l’échelle régionale.
(Source : BRGM pour le CROCC_2021)