Financer la transition écologique et énergétique en Occitanie : une analyse de la tuyauterie des circuits de financement

Antoine DUCASTEL (CIRAD – ArtDev)

Les dispositifs publics de financement dédiés à la transition écologique et énergétique (TEE) se sont multipliés au cours des dernières années : fonds chaleur et déchet, Appels à projets (AAP) Territoire à Énergie Positive pour la Croissance Verte (TEPCV), Certificat d’économie d’énergie (CEE), France Relance 2020. Ces financements sont gérés et distribués par une diversité d’institutions publiques (ADEME, collectivités, DREAL, Caisse des dépôts et consignations, Agence Régionale Energie Climat, etc.) et fléchés vers les secteurs prioritaires de la TEE (SNBC 2020) : énergies renouvelables, mobilité durable, agroécologie, rénovation des bâtiments, etc.

Toutefois, l’offre de financement existante ne rencontre pas toujours une demande, autrement dit des porteurs de projets engagés dans la TEE et qui soient capables de répondre aux critères d’éligibilité sur le plan technique, administratif ou financier. En effet, nous observons une contradiction persistante entre des porteurs (collectivités, entreprises, associations) qui déplorent l’absence de financement, et les financeurs l’absence de projets (Cohen et al., 2018). L’équipe de recherche pluridisciplinaire en science sociale (sociologie, économie, science politique, géographie) du projet INTEERface s’intéresse justement aux circuits de financements de la TEE et en particulier aux facteurs économiques, sociaux et politiques qui permettent, ou entravent, l’atterrissage de ces financements dans les territoires d’Occitanie.

La région Occitanie est un cas d’étude intéressant pour observer la mise en adéquation et la conformité entre des financements publics pour la TEE d’une part, des structures sociales, économiques et politiques d’autre part. En effet, l’Occitanie recèle un important potentiel en vertu de ses caractéristiques géographiques et naturelles, notamment pour le développement des énergies renouvelables, ou du volontarisme politique de nombreuses collectivités à commencer par la Région (Scénario REPOS 2018). Toutefois, la région est traversée par de profondes inégalités sociales et territoriales qui conditionnent et contraignent la TEE et son financement.

Pour analyser la tuyauterie des circuits et l’atterrissage des financements, nous adoptons une approche par le bas et territorialisée. Concrètement, nous partons des projets de TEE existants en Occitanie pour remonter ensuite le long des flux financiers qui les irriguent. Par ailleurs, nous accordons une attention particulière aux expériences et aux pratiques des acteurs tout au long des circuits : chargés de projet et instructeurs au sein d’institutions financières publiques ou de collectivités, entrepreneurs, élus, etc.

Dans un premier temps, l’équipe du projet INTEERface s’attachera à élaborer un panorama des financements TEE en Occitanie, en s’inspirant notamment du travail réalisé par l’I4CE à l’échelle nationale (I4CE 2020). L’analyse statistique multidimensionnelle et l’analyse de flux nous permettra de dresser une cartographie régionale dynamique des projets et des financements TEE depuis la fusion régionale. Cette analyse quantitative met en lumière la répartition spatiale (entre différents territoires et collectivités) et sociale (entre différents porteurs) des financements. Dans un second temps, l’étude qualitative et comparative de dispositifs financiers (guichet, appel à projet) et de projets spécifiques, de la phase de montage à l’opérationnalisation, mettra en lumière les multiples facteurs sociaux sous-jacents à la rencontre durable entre des financements et des porteurs.